COURS : le contrat de travail
Intéressant ce chapitre, voyons si j’ai bien saisi toutes les subtilités à travers le quizz.
Cas pratique : mes sabots sont fantastiques
Cas pratique : une proposition difficile à refuser
L’éco et moi : le petit boulot de Francisco
Vendredi arrivait et j’avais prévu d’organiser une super fête demain à la maison pour célébrer bah … Rien du tout, juste pour se voir autour d’un déjeuner sympa, et puis mon père nous amenait tous au paint-ball dans l’après-midi. J’avais prévu d’inviter Gaston, Mathilde, Frank, Théo, Francisco, Benji, Huang …
« Invite aussi Anthinéa me demanda Théo, mais si Benji vient j’hésite …
– T’aurais pu me prévenir avant, moi je serais bien venu avec vous », se désola Francisco.
« T’es invité, donc tu viens, je ne vois pas où est le problème.
– Mais non je travaille samedi pour Monsieur Bouteiller, le fromager sur le marché, et l’après-midi je lui ai promis de l’aider à déménager sa cave d’affinage pour les fromages. »
Théo s’assit sur les marche de l’escalier de la cour, je voyais bien que les activités de Francisco l’intéressaient puisqu’il s’était mis en tête de se trouver un petit boulot après le bac, aussi déraisonnable que cela soit. Il était là en train de mûrir sa question qui finalement passa le seuil de sa réflexion : « Alors du coup le père Bouteiller c’est ton employeur ?
– Je travaille pour lui de temps en temps, quelques samedis par semaine, mais c’est vrai que depuis le mois dernier il me sollicite pratiquement toutes les semaines.
– Ce que je vois c’est que la fromagerie Bouteiller t’emploie comme salarié à temps partiel en CDI.
– Mais non ! », lui rétorqua Francisco agacé.
Puis il argumenta : « Je donne un coup de main de temps en temps et il me paie pour des services que je lui rends, c’est un peu comme appeler son plombier quand on a des problèmes de fuites ou d’infiltration, c’est pareil, rien à voir avec un travail salarié.
– Non, mais moi je ne dis pas cela pour t’embêter Francisco, juste qu’à ta place je demanderais qu’il me paie comme un salarié avec cotisations et chômage s’il veut plus faire appel à moi.
– N’importe quoi !
– Mais si ! Le père Bouteiller il te dit quoi faire, il donne des ordres donc il existe un lien de subordination. En échange il te verse une rémunération. Il t’explique aussi comment travailler en mettant à ta disposition des outils, des machines, il te reprend si tu commets des erreurs parce que tu dois travailler selon certaines règles. Si tu ne respectes pas ces règles, il ira trouver quelqu’un d’autre pour l’aider pas vrai ?
– Évidemment, je dois respecter des règles d’hygiène pour manipuler les fromages, mais c’est normal ça.
– Alors c’est bien un contrat de travail », en conclut doctement Théo, sûr de lui.
Puis, il reprit : « Moi à ta place, je réclamerais une requalification en contrat de travail avec mention du travail que je fais, du temps de travail par semaine, du lieu de travail soit sur le marché ou à la fromagerie, et puis que le salaire soit mentionné avec au minimum le SMIC horaire. Tu ne fais pas beaucoup d’heures comme tu travailles que le samedi donc c’est un temps partiel et comme il n’y a pas de contrat écrit c’est un CDI.
– Ben voyons, avec tes bons conseils, on va s’engueuler alors qu’on s’entend plutôt bien, puis il va me virer.
– Ce serait un licenciement abusif, t’aurais en plus une indemnité de licenciement et le droit à une allocation chômage.
– Je ne le voyais pas comme ça moi, j’aurais l’impression d’abuser, et puis il m’a formé à la vente, il m’aide à préparer le grand oral du bac, et désormais je suis qualifié pour travailler dans une fromagerie.
– Ah ouais quand même ! Fais attention alors à qu’il ne mette pas une clause de non-concurrence dans le contrat.
QUESTIONS
1. Pourquoi le travail d’un plombier auprès d’un particulier ne constitue-t-il pas un contrat de travail ?
2. Le travail de Francisco relève-t-il d’un contrat de travail ?
3. À quoi sert une clause de non-concurrence ?
4. Il vous est demandé de donner des arguments pour et contre la requalification des contrats Uber en contrats de travail (annexes 1 et 2), pour cela vous allez développer un raisonnement :
- Distinguez la relation de travail salarié de celle de simple prestation de service.
- Expliquez le principe de fonctionnement de l’application Uber Pop
- Indiquez ce qui relève de la prestation de service dans les contrats Uber.
- Mentionnez des éléments qui peuvent relever d’une relation de travail salarié.
- Déduisez-en une solution juridique, doit-on ou non requalifier les contrats Uber ?
Annexe 1. Uber est-il un employeur ?
(…) La Commission du travail de Californie a rendu, le 16 juin dernier, une décision ayant requalifié en contrat de travail la relation existant entre Uber et l’un de ses ex-chauffeurs. La défense d’Uber reposait alors sur le fait qu’Uber était une plate-forme technologique liée à ses chauffeurs par des contrats de prestation de services. Telle n’est pas la position prise par la Commission du travail de Californie qui a considéré qu’Uber était une société de transport de passagers par voitures privées liée à ses chauffeurs dans le cadre d’une relation de travail.
On ne peut écarter que la décision de la Commission du travail de Californie fasse jurisprudence en France. Les juges français sont généralement prompts à requalifier les contrats de prestation de service en contrats de travail toutes les fois que les prestataires de services sont placés à l’égard de leurs mandants dans une relation de dépendance économique et juridique.
La situation de dépendance économique des popers[1] pourrait être caractérisée s’il était démontré que leur source de revenu est exclusivement ou majoritairement constituée par les commissions versées par Uber. Cela pourrait être le cas d’un nombre significatif de chauffeurs car le système de primes (« primes régulières » et « majoration tarifaire automatique » pour les popers acceptant de travailler le matin, le soir et le week-end) mis en oeuvre par Uber est là pour les inciter à travailler toujours plus. Autre indice de dépendance économique, Uber se réserve le droit de désactiver les popers de son application s’ils ne se sont pas connectés 180 jours d’affilée.
Le risque de dépendance juridique des popers n’est pas moindre. Les passagers paient un prix fixe à Uber, lequel prélève aux chauffeurs une commission non négociable de 20 % sur chaque course qu’ils traitent et leur reverse la différence. Les primes et majorations tarifaires que le poper perçoit sont, elles aussi, unilatéralement déterminées par Uber. Parce qu’elles échappent à toutes négociations préalables, ces rémunérations pourraient recevoir la qualification de salaire devant un conseil de prud’hommes.
Les popers dont la notation par les utilisateurs est en moyenne inférieure à 4,5 sont susceptibles d’être déconnectés de l’application. La déconnexion en résultant pourrait être considérée par un juge comme une sanction imposée par Uber à ses chauffeurs. Enfin, alors que le prestataire de services est censé assurer l’exécution de son travail à l’aide de ses propres outils, les popers se voient fournir un smartphone s’ils n’en possèdent pas un afin de pouvoir accéder à l’application.
Depuis le 21 mars 2015, Uber demande aux popers de s’immatriculer, à tout le moins, en tant qu’auto-entrepreneur. Cette régularisation paraît cependant insuffisante pour écarter tout risque de requalification car ce qui prime, aux yeux des juges, est de savoir si, dans le système mis en place par Uber, les popers jouissent d’une réelle autonomie dans l’exercice de leur travail. Au vu de ce qui précède, on peut en douter.
Patrick Thiébart, avocat associé au cabinet Jeantet in Les Échos, le 29 juillet 2015.
Annexe 2. Les chauffeurs Uber sont-ils des salariés déguisés ?
(…) La justice Californienne a requalifié les contrats Uber en contrats de travail.
Qu’en serait-il en France ? « Le raisonnement est sensiblement différent de celui de la décision californienne, qui met essentiellement l’accent sur la dépendance économique du chauffeur, explique Me Sicard. Ce critère n’est en France que l’un des facteurs qui permettent d’identifier un contrat de travail, mais il n’est pas obligatoire. Ce qui compte, c’est de savoir si le chauffeur dépend ou non de son employeur dans sa journée et dans le détail de son activité. Est-il libre de sa manière de travailler ? A-t-il d’autres activités et d’autres sources de revenus ? Est-il sanctionné quand il enfreint le schéma d’organisation de la plateforme ? S’il est évalué, s’agit-il d’un simple compte rendu d’activité dans le cadre d’un contrat indépendant, ou cette évaluation pourra-t-elle avoir un impact sur sa carrière, ce qui est un indice de relation de travail ? C’est la règle du faisceau d’indices qui fera que le curseur de l’autonomie du chauffeur se déplacera soit vers l’indépendance, soit vers le salariat ».
(…) « Dans la mesure où la personne travaille dans un cadre organisé par autrui, elle peut prétendre à une requalification. C’est précisément cela qui sera en arrière-plan dans le cas d’Uber, note Bernard Teyssié. On peut d’ores et déjà observer que les chauffeurs ont une grande marge de liberté sur leurs horaires de travail, ce qui n’était pas le cas des participants de L’Ile de la tentation. Autre élément plaidant en faveur d’Uber : celui-ci n’a pas de pouvoir disciplinaire proprement dit. Le fait de noter les chauffeurs et de les écarter du réseau s’ils sont mal notés ne caractérise pas en soi la subordination. Uber peut en effet se défendre en disant qu’il agit comme n’importe quelle tête de réseau de franchise. Le franchisé qui ne respecte pas la charte du franchiseur est écarté du réseau de franchise, et ce, dans l’intérêt de l’ensemble des membres du réseau. »
Et c’est d’ailleurs ce que plaidera Uber devant les conseillers prud’homaux : l’exigence sur la qualité et le professionnalisme des chauffeurs ne sont pas synonymes de dépendance. « Les partenaires chauffeurs sont totalement libres de se connecter à la plateforme quand bon leur semble, que ce soit une heure par mois ou plusieurs heures par semaine. Certains ont leur clientèle personnelle, des particuliers, des hôtels ou des restaurants par exemple. Ils peuvent être “multiplateformes” en se connectant simultanément sur les applications de transport à la demande de sociétés concurrentes. Et s’ils s’affilient à Uber, c’est précisément parce qu’ils recherchent cette liberté », assure un porte-parole d’Uber. La société de VTC revendique à cet égard près de 90 % de chauffeurs satisfaits de leur statut.
Laurence Neuer, Le Point, le 2 novembre 2015
Points du référentiel : le contrat de travail, le lien de subordination, le pouvoir de direction, le pouvoir règlementaire, le pourvoir disciplinaire, les clauses spécifiques du contrat de travail.
Le sujet de bac : indépendant ou salarié ?
Sujet de bac sur une clause de mobilité
Autre sujet de bac sur une clause de mobilité
Et un troisième sujet de bac sur la clause de mobilité
Sujet de bac sur une clause de non-concurrence
[1] Chauffeurs Uber Pop
[2] Cour de cassation