Vous répondrez aux questions du cas pratique à partir de vos connaissances et des informations juridiques en annexe.
QUESTIONS
- Déterminez le problème juridique.
- Qualifiez juridiquement la situation qui a été faite à Ariamala.
- Précisez les conséquences juridiques des faits dont s’est rendue coupable la tante d’Ariamala.
Ariamala, jeune indienne de 21 ans, s’est échappée du restaurant où elle était enfermée afin de se plaindre de sa situation. Sa tante l’a fait venir en France avec un simple visa court séjour lui promettant de lui faire obtenir un visa long séjour pour poursuivre ses études. La tante ne tiendra pas sa promesse et lui impose différentes corvées à son domicile au prétexte de rembourser ses frais de transport. Au bout de deux mois, la tante la remet entre les mains d’un de ses amis restaurateur qui a besoin de main d’oeuvre. Ariamala va travailler 6 mois dans cet établissement avant de s’enfuir. Elle n’a perçu aucun salaire, se nourrissait des restes des plats servis et dormait enfermée dans la cave. Sa tante avait perçu 800 euros par mois du restaurateur depuis qu’elle y avait placée Ariamala.
Annexe 1. Informations juridiques mises à votre disposition :
Article 224-1 A du Code pénal. La réduction en esclavage est le fait d’exercer à l’encontre d’une personne l’un des attributs du droit de propriété. La réduction en esclavage d’une personne est punie de vingt années de réclusion criminelle.
Participe de la catégorie des choses tout ce qui ne peut être considéré comme une personne c’est-à-dire comme titulaire de droits et obligations.
Le droit de propriété sur une chose se compose de trois attributs qui appartiennent au propriétaire et lu permettant d’en faire usage, d’en obtenir le fruit par exemple en louant la chose, d’en disposer par exemple en vendant ou en détruisant la chose.
Article 225-4-1 du Code pénal.
I. – La traite des êtres humains est le fait de recruter une personne, de la transporter, de la transférer, de l’héberger ou de l’accueillir à des fins d’exploitation dans l’une des circonstances suivantes :
1° Soit avec l’emploi de menace, de contrainte, de violence ou de manœuvre dolosive visant la victime, sa famille ou une personne en relation habituelle avec la victime ;
2° Soit par un ascendant légitime, naturel ou adoptif de cette personne ou par une personne qui a autorité sur elle ou abuse de l’autorité que lui confèrent ses fonctions ;
3° Soit par abus d’une situation de vulnérabilité due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, apparente ou connue de son auteur ;
4° Soit en échange ou par l’octroi d’une rémunération ou de tout autre avantage ou d’une promesse de rémunération ou d’avantage.
L’exploitation mentionnée au premier alinéa du présent I est le fait de mettre la victime à sa disposition ou à la disposition d’un tiers, même non identifié, afin soit de permettre la commission contre la victime des infractions de proxénétisme, d’agression ou d’atteintes sexuelles, de réduction en esclavage, de soumission à du travail ou à des services forcés, de réduction en servitude, de prélèvement de l’un de ses organes, d’exploitation de la mendicité, de conditions de travail ou d’hébergement contraires à sa dignité, soit de contraindre la victime à commettre tout crime ou délit.
La traite des êtres humains est punie de sept ans d’emprisonnement et de 150 000 € d’amende.
II. – La traite des êtres humains à l’égard d’un mineur est constituée même si elle n’est commise dans aucune des circonstances prévues aux 1° à 4° du I.
Elle est punie de dix ans d’emprisonnement et de 1 500 000 € d’amende.
Annexe 2 . Cour de cassation, Chambre criminelle, 9 février 2016.
[…] Aux motifs que M. [S] déclarait avoir accueilli Mme [W] à la demande de M. [F] qui avait recueilli la plaignante pour une nuit, suite à sa fugue de chez son oncle mais qui ne pouvait pas la garder plus longtemps du fait de l’exiguïté de son appartement ; qu’il disait l’avoir considéré comme sa fille, indiquant qu’elle s’occupait effectivement de ses enfants ; qu’il contestait lui avoir interdit de sortir ou de manger ; que chaque semaine il lui avait donné 30 à 50 euros d’argent de poche et sa femme lui avait acheté des vêtements ; que lorsqu’elle avait voulu partir, il lui avait remis 1 000 euros pour l’aider à s’en sortir ; qu’il avait également fait un geste pour sa famille en lui faisant remettre par l’intermédiaire de M. [F] la somme de 1 600 euros ; que Mme [D], épouse [S], confirmait les déclarations de son mari sur les conditions d’arrivée de la plaignante à leur domicile ; qu’elle contestait l’avoir traitée comme une esclave ; qu’elle mangeait et dormait avec les enfants ; qu’elle faisait un ménage sommaire de l’appartement et partait avec eux en vacances ; qu’elle expliquait avoir voulu l’aider pour ne pas la laisser dans la rue ; qu’elle reconnaissait comme seule erreur de l’avoir hébergée alors qu’elle n’avait pas de papiers (…) Mme [W] a affirmé avoir rejoint, le 23 septembre 2005, par l’intermédiaire d’une amie de son employeur grenoblois, le domicile des époux [S] pour y travailler en tant que femme de ménage et garde d’enfants ; (…)
Alors que le fait d’obtenir d’une personne, dont la vulnérabilité ou l’état de dépendance sont apparents ou connus de l’auteur, la fourniture de services non rétribués ou en échange d’une rétribution manifestement sans rapport avec l’importance du travail accompli est punissable pénalement ; qu’en affirmant que l’infraction de rétribution inexistante ou insuffisante du travail d’une personne vulnérable ou dépendante n’était pas caractérisée tout en relevant que M. [S] avait déclaré avoir recueilli Mme [W] alors qu’elle était en fugue de chez son oncle, qu’elle s’occupait effectivement de ses enfants, qu’il lui versait 30 à 50 euros d’argent de poche par semaine, Mme [S] ayant ajouté qu’elle faisait un ménage sommaire de l’appartement, qu’elle mangeait et dormait avec les enfants et qu’elle avait voulu l’aider pour ne pas la laisser dans la rue, alors que le fait d’obtenir les services d’une personne étrangère que l’on sait isolée, logée par son employeur dans la chambre des enfants âgées dont elle s’occupe tous les jours de la semaine et qui effectue des tâches domestiques, sans contrepartie en rapport avec l’importance du travail fourni caractérise l’obtention abusive de services non rétribués ou insuffisamment rétribués d’une personne vulnérable ou dépendante, la chambre de l’instruction n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation des textes susvisés. (…)
Annexe 3. Tribunal judiciaire de Lyon, 16 décembre 2010
Le tribunal a jugé l’affaire d’une femme en situation irrégulière, qui avait travaillé sur une durée de plus de 10 ans, 15 heures par jour et 7 jours sur 7 en tant que domestique, sans contrat de travail et pour une rémunération de 100 à 150 euros chez un couple qui l’hébergeait. Le couple en question a été condamné au pénal à une peine d’un an avec sursis pour traite d’être humain, soumission à des conditions de travail indignes, et absence de rémunération d’une personne vulnérable. Au civil la condamnation consiste en le versement de dommages et intérêts au titre des pertes de salaires, des droits à la retraite et du préjudice moral pour un montant total de 40 360,06 euros.
Source : d’après le Comité contre l’esclavage moderne